Sur l'îlot de cuisine, mon iPad a émis un bip strident. Une nouvelle notification. J'ai d'abord jeté un coup d'œil à l'écran sans grande attention, mais ce que j'ai vu m'a paralysé, comme si l'air de la pièce s'était glacé.
Un « ami » avait publié une story sur Instagram. C'était une courte vidéo, un boomerang. On y voyait des coupes de champagne qui s'entrechoquaient, un feu de cheminée crépitant dans une pièce luxueuse, une douce musique de jazz en fond sonore, et là, reflété nonchalamment mais sans équivoque dans un miroir, il y avait lui.
Martin Caldwell.
Il portait la même montre Patek Philippe que je lui avais offerte pour notre anniversaire. La même veste bleu marine sur mesure, faite à Londres. Il se tenait trop près, dangereusement près, d'une femme aux cheveux blonds éclatants et aux lèvres rouges qui riait un peu trop facilement à ce qu'il lui chuchotait.
J'ai tapoté l'écran pour faire défiler l'histoire une fois, deux fois, trois fois. J'ai eu le souffle coupé. Ce n'était pas une crise de panique ; c'était pire. C'était une confirmation froide et absolue. J'ai longuement fixé l'image figée, puis j'ai posé calmement l'iPad sur la table, un calme qui m'effrayait.
Le silence dans la pièce changea. Il n'était plus vide. Il était désormais empli. Empli de clarté. De sens. Du poids insoutenable qui accompagne l'instant précis où l'on cesse d'attendre et où l'on commence à comprendre.
Je n'ai pas pleuré. Je n'ai pas crié. Aucune fureur ne s'est emparée de moi, aucune vaisselle précieuse n'a été brisée, aucun verre n'a été cassé. Je suis simplement entrée dans le salon, j'ai éteint les guirlandes lumineuses du sapin de Noël qui me paraissaient désormais ridicules, et je me suis assise dans l'obscurité. Le bébé a donné un autre coup de pied, cette fois plus fort, plus insistant, comme pour me rappeler : « Maman, je suis toujours là. Nous sommes toujours là. »
J'ai posé ma main sur mon ventre et j'ai esquissé un sourire. C'était un sourire triste, forcé, brisé, mais un sourire tout de même.
« Tout ira bien », ai-je dit à voix haute, scellant un pacte.
Le lendemain matin, le ciel de Charleston se parait d'un calme argenté. Il ne neigeait pas, mais le froid s'était installé pendant la nuit, recouvrant de givre la balustrade du porche et faisant friser les feuilles du magnolia centenaire de notre jardin.
Je me tenais près des portes-fenêtres, une tasse d'eau chaude citronnée à la main, à contempler le lever du soleil. Le feu dans la cheminée s'était éteint depuis des heures, et sous le sapin gisait une rangée de cadeaux non ouverts, luxueusement emballés de rubans de velours. Des présents pour un mari qui n'était pas rentré. Je n'en ai touché aucun.
Au lieu de cela, j'ai pris le téléphone et composé un numéro que je connaissais par cœur.
—Carmen ? — ai-je dit lorsque mon amie et agent immobilier a répondu d'une voix endormie.
—Juliana, Joyeux Noël ! Y a-t-il un problème ? Il est très tôt.
Bonnes fêtes ! Je suis prêt à mettre la maison en vente.
Il y eut un long silence à l'autre bout du fil.
—Juliana… tu es sûre ? C’est Noël. Il s’est passé quelque chose avec Martin ?
« Bien sûr que j’en suis sûre », dis-je d’une voix ferme, sans trembler. « Je n’élèverai pas ma fille dans une maison où je me sens petite, Carmen. Dans une maison pleine d’échos. »
Un autre silence. Carmen, qui me connaissait mieux que quiconque, comprit que ce n'était pas le moment de poser des questions.
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